Le timbre numérique : c’est pour bientôt ?

De notre correspondant, au Ministère des Informations Officielles.

L’ICANN, l’organisme qui gère les noms de domaines sur Internet, en partenariat avec l’IANA, qui gère les adresses IP du net, ainsi que des grands de l’informatique tels que Google, Microsoft et IBM, proposent une solution anti-spam simple et efficace : le timbre numérique, ou eStamp.

« Le spam coûte énormément cher aux fournisseurs d’accès à Internet et aux autres acteurs du réseau, car il consomme énormément de bande passante. En effet, plus de 90% des mails échangés dans le monde est du spam », explique l’ICANN. Sans compter les coûts liés à la mise en place des filtres anti-spam chez les FAI. D’où l’idée de faire payer tout simplement les échanges par mail, jusqu’ici totalement gratuits.

Afin de mettre en place un tel système, les utilisateurs devront donc envoyer leurs mails à partir du serveur SMTP de leur FAI, qui lui, apposera le timbre numérique (et les facturera au client), et relayera les mails vers des serveurs centralisés, et uniquement ceux-là. Ces serveurs vérifieront la validité du timbre, l’oblitèreront électroniquement, décompteront le timbre sur le compte du FAI afin de le facturer sur le nombre de mails envoyés, et enverront finalement le mail vers le FAI du destinataire final. Les FAI ne pourront recevoir que des mails venant du serveur central et oblitérés, donc validés par le serveur central. Le procédé utilisé pour apposer le timbre et l’oblitérer sera basé sur la signature électronique PGP afin d’empêcher les utilisations frauduleuses (envoi de mail directement vers un FAI sans passer par le serveur central, par exemple). La sécurité du serveur sera assurée par un pare-feu sous licence libre : OpenOffice.

La particularité de ce serveur central est qu’il devra donc prendre en charge la totalité des mails du monde entier. Il fera, en plus de la signature électronique, divers contrôles sur l’expéditeur et les destinataires ainsi que sur le contenu du message, afin de procéder à un filtrage anti-spam général et pénalisera les FAI le cas échéant (qui pénalisera alors ses clients). La méthode de filtrage est encore inconnue, et le fournisseur de ces serveurs de messagerie gigantesques aussi, mais on sait que Google s’est proposé immédiatement, mettant en avant leur « technologie avancée » en matière d’analyse de contenu à caractère privé. Les internautes seront aussi invités à installer un anti-virus officiel nommé HADOSPAM afin de protéger leur ordinateur de programmes malveillants qui enverraient des spams depuis leur machine. Tout internaute qui refusera cette mesure sera considéré coupable du fléau des spams et devra payer pour tous les autres, sans recours possible (sur le papier si, mais en pratique, la complication et les délais sont tels qu’il ne sera pas imaginable d’obtenir réellement un recours avant le décès dudit fautif).

Du côté des FAI, la réaction ne s’est pas fait attendre. Free, par exemple, annonce d’ores et déjà que le coût des timbres sera facturé au client directement sur sa facture mensuelle. Orange, pour simplifier la compréhension de ce changement à ses internautes lambda, veut jouer sur l’analogie et proposera à la vente des carnets de 10 timbres numériques. Neuf, pour sa part, invitera l’internaute à acheter ses timbres via Paypal. Il faut préciser que la réception des mails restera gratuite.

Le prix de ce timbre numérique n’a pas encore été fixé. Il sera calculé en fonction des ressources nécessaires à la mise en place du système de centralisation et de filtrage du serveur mail. Il est également prévu de facturer plus cher les gros mails ou les pièces jointes, à l’instar des colis postaux. Tout mail dépassant 20 Ko (à l’image des 20 grammes) coûtera donc plus cher.

Il y a un mécontent dans l’histoire : La Poste, et son portail laposte.net, qui n’aura plus le monopole sur la vente de timbres en France.

Récapitulons : haute autorité qui a le pouvoir de décision, logiciel mouchard obligatoire, présomption de culpabilité, prétexte bidon pour faire du filtrage obscur, bafouage de la vie privée, moyens techniques extravagants, limitation de la liberté individuelle pour des histoires d’argent, faux sentiment de sécurité… Cela ressemble fort aux principes de la loi dont nous avons eu affaire il y a quelques années de cela, en 2009, et qui s’appelait : HADOPI.

1 réflexion au sujet de « Le timbre numérique : c’est pour bientôt ? »

  1. Joli. Très bien joué. La première allusion à OpenOffice m’a fait sourire, je croyais que c’était un petit troll, mais jusqu’aux 3/4 du billet j’y ai vraiment cru 🙂 .
    Félicitations !

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